Published December 2024 | Version v1
Report

Mission archéologique Franco-Soudanaise à Kadruka (MaFSàK)

Description

Résultats du quadriennal 2020-2023La fouille du cimetière KDK.23 est difficile mais progresse de façon continue. Dans toute la région, c'est la première fouille utilisant des méthodes modernes de terrain, les données de l'archéo-anthropologie et les plus récentes méthodes d'étude ; son objectif est d'être la fouille exhaustive et l'étude complète d'une nécropole néolithique, ce qui en fera une grande première dans le contexte régional (aucun des grands cimetières fouillés par notre prédécesseur ne l'a été de cette façon).La nécropole KDK.23 totalise désormais 172 individus, pour une surface occupée par les tombes d'environ 120 m2 (et une zone fouillée de plus de 230 m2) ; et un effectif de 202 structures (certaines n'étant pas funéraires). Le quadriennal écoulé (avec le décalage des rapports évoqué ci-dessus) a donc permis de fouiller 50 individus supplémentaires et les études ostéologiques menées parallèlement aux campagnes de fouille ont fait notablement progresser nos connaissances. Les datations radiocarbone, réalisées en 2020 et 2022 sur le matériel funéraire accompagnant les défunts, proposent une fourchette chronologique étroite du Néolithique moyen de 4790-4500 cal BCE (à 95 %), avec une réutilisation plus tardive (quelques tombes semblables à celles de KDK1) autour de 4350-4250 cal BCE (à 95 %). La dernière campagne a confirmé la grande densité d'inhumations, pour une faible extension par rapport à la surface de la butte dans son ensemble (butte naturelle au milieu des chenaux du Nil, ancienne terrasse du fleuve). Grâce à nos dernières vérifications et à une exten-sion vers le carré G8, nous avons désormais atteint les limites du cimetière au sud, à l'est et probablement au nord ; il reste de nombreuses sépultures à fouiller à l'ouest (dont celles repérées dans la grande coupe 7/8 encore en place) et sous les tombes les plus profondes, dans le carré L8. Les tombes de KDK.23 sont en majorité des sépultures individuelles primaires (position latérale, droite ou gauche, fléchie ou hyper-fléchie) mais il y a aussi deux sépultures doubles avérées et de nombreux cas de recoupements, superpositions et « vidanges » partielles ou complètes (remplissant la fosse de tombes plus récentes). Le matériel funéraire est diversifié, réparti de manière très inégale, parfois abondant (parure, outils, céramique, etc.). Des traces de violences interpersonnelles sont avérées sur au moins 3 individus. La répartition spatiale, avec des « bandes » obliques d'occupation très dense, comme ces associations, confirment notre hypothèse d'une volonté délibé-rée de regrouper quatre, cinq et jusqu'à dix individus (selon un critère qui nous reste à découvrir : famille, statut social, ... ?) ; ces recoupements et associations font partie intégrante de la chaîne opératoire de KDK.23 (du « programme funéraire »), ce qui est une pratique jusqu'alors tout à fait inédite dans ce contexte néolithique.Sur la concession de Kadruka, de très nombreux sites d'habitat, totalement inédits jusque-là (pour ne pas dire ignorés) ont été repérés et fouillés (au moins partiellement), lors des dernières saisons de terrain ; fragiles car toujours en surface ou sur des lentilles de limon en bordure des paléochenaux du fleuve, ces sites sont aujourd'hui rapidement détruits ou menacés, non pas par les affrontements actuels ou les pillages, mais par l'extension rapide des cultures (justement sur les limons anciens, grâce à une irrigation par forages profonds). Notre projet, au départ centré sur le 5e millénaire BCE, a été élargi et se présente désormais, à l'orée de ce nouveau quadriennal, de façon totalement nouvelle. La présence, inédite pour cette période, de structures d'habitat en place, en liaison avec d'anciens chenaux du Nil, est maintenant démontrée (KDK.23H, KDK.5). Lors des deux dernières campagnes, les prospections mais aussi les analyses et les datations radiocarbone ont permis d'étendre ce constat au 4e millénaire (pourtant réputé un « gap » dans la séquence régionale), ce qui est vraiment exceptionnel (sites KDK.5A et KDK.5B) : nous avons observé l'existence de foyers, de zones de débitage in situ, etc., en particulier le long des paléochenaux, repérés parfois sur plusieurs kilomètres (en particulier à KDK.5B).Perspectives et objectifs futursLes résultats du premier quinquennal permettent d'assoir sur un socle solide le projet scientifique des années futures dont la problématique générale est centrée sur les interactions bioculturelles, avec comme objectifs :(1)les pratiques funéraires dans leur double dimension symbolique et pratique, avec un intérêt particulier pour les remaniements postérieurs à l'inhumation et la momification naturelle (au moins un exemple) ;(2)l'organisation sociale et le questionnement sur le renforcement de la hiérarchisation de la société, y compris à travers le « recrutement » des défunts et leur traitement dans le cimetière ;(3)l'état sanitaire des populations et la mortalité ;(4)la question spécifique des traces de violence inter-personnelle ;(5)les relations entre occupation de l'espace (settlement pattern) et environnement : implantation des nécropoles et des habitats aux différentes périodes du Néolithique et du Pré-Kerma, en relation avec l'évolution du cours du Nil (fin du Néolithique et Pré-Kerma étant inconnus jusqu'alors dans la zone) ;(6)la culture matérielle et les structures d'habitat (pratiquement inédites pour ces périodes) ;(7)l'exploitation des ressources animales et végétales.

Additional details

Identifiers

URL
https://hal.science/hal-04878236
URN
urn:oai:HAL:hal-04878236v1

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